Pour la MUSIQUE!!!

Publié le par Hugo

Du piano. De la reverb, beaucoup de réverb…

Un accord de Do majeur. Même sans avoir l’oreille absolue, il se reconnaît aisément à sa transparence insipide.

La mineur. Mon dieu, c’est pas vrai ; elle ne va pas oser !

Inutile de préciser qu’à partir de ce moment, l’écoute est résignée (pourtant le morceau est commencé depuis moins de  quatre secondes).

Sol Majeur, sans le passage par Fa et la reverb qui n’en finit pas.

Une voix, belle et pure, formatée à souhait. Des « na na na » ponctuant des paroles manifestement pas écrites par Byron ou Shakespeare (même si c’est dans leur langue).

Un sempiternel 4 temps se met en place, pendant que des arpèges sirupeuses dégoulinent comme du beurre fondu des enceintes.

ç’en est trop. STOP !!!!!!!!!!!!!!!!

 

 

Encore un tube formaté (que certains auront peut-être reconnu) D’autres pourront dire que c’est avoir l’esprit fermé que de refuser d’écouter cette musique jusqu’au bout avant d’émettre un jugement.

Le problème est que l’utilisation du terme musique n’est pas ici tout à fait appropriée. Certes celui-ci désignait probablement à ses origines une poésie ordonnée, simple et agréable. Mais c’est nier les conquêtes opérées par l’humanité depuis la Grèce antique…

Il s’agit ici d’une production sonore stéréotypée visant à toucher de manière simpliste les archétypes situés en chaque être humain de culture occidentale, par des processus éprouvés maintes fois. Le créateur (ou la créatrice, dans le cas présent) n’a peut-être même pas conscience de son acte, car son esprit est trop ancré dans le langage qu’il (ou elle) parle. Et cette chanson, objet de mon courroux est peut-être écrite et interprétée avec une sincérité sans faille.

Cet article n’est pas un plaidoyer contre la variété ou un autre style en particulier. Il ne fait pas non plus l’apologie de la musique savante. Il s’indigne juste contre le terrifiant danger d’uniformisation qui guette l’art humain et qui pollue insidieusement nos esprits à tous ! Oui tous !

La musique, art du métissage de l’ouverture, du rapprochement et de la paix dans le monde. La musique qui alimenta les plus grandes philosophies orientales et occidentales. La musique pythagoricienne ; celle des Troubadours des Saltimbanques et des Goliards ; celle des marins, celle des aèdes et des « guitareux » , celle des transes vaudoues ou du théâtre Nô ; celle des groupes de jazz et de rock clandestins à l’époque soviétique ; celle qui accompagna la naissance de la spiritualité, du langage et probablement de la pensée humaine. Cette même musique serait-elle  en train de prendre un chemin contre lequel Walter Benjamin nous a mis en garde voici presque un siècle ?!

(L’Œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique, ouvrage court, que je conseille vivement !)

La musique est-elle juste un objet de remplissage sonore d’une société qui ne veux plus prendre le temps de se regarder ? D’outil de pensée pourrait-elle devenir l’objet qui annihilera celle-ci ? Ou est-ce seulement la volonté commerciale et rien d’autre qui prendra le dessus ?

Toujours est-il que cette musique nie une grande part de ce qui a fait l’homme.

Pour revenir sur notre « tube » :

-          Pas de singularité dans le timbre, ni de l’instrument, ni de la voix.

-          Tonalité immuable de Do majeur ; on visualise très aisément les doigts de la pianiste, rien qu’à l’écoute. Niveau de piano : 3 mois de cours ; la reverb fait le reste.

-          Carrure obstinément régulière.

-          L’harmonie est réduite aux seules fonctions de tonique et dominante négligeant ainsi… tout le reste.

Cette absence d’accord de sous-dominante, principale conquête du 19ème siècle, celui des révolutions et de l’émancipation de la démocratie, le tout sur un tempo fixe, nous ramène aux temps de l’ancien régime où la pensée était écrasée au sein de la masse du peuple et le rapprochement avec les angoisses de Walter Benjamin, qui écrit, à l’époque, en pleine montée du fascisme est inévitable. Chacun de ces tubes stéréotypé sorti tout droit des radios dîtes « libres » est comme une nouvelle explosion nucléaire dont l’iode sonore radioactif s’accumule sur celui des explosions précédentes. La pollution s’accroît donc au fil du temps et ces OMM (organismes musicalement modifiés) sont déjà profondément introduits dans la bio-diversité culturelle de notre planète. Pas seulement en Europe, mais également en Afrique, en Asie…

Simplisme, clichés… Sortir une chanson pour voix et piano en 2012, c’est comme écrire un film avec un héros handicapé ou faire une émission TV avec des Ch’tis. Succès populaire assuré si on a le producteur qu’il faut et abrutissement des masses à la clé.

 

Je voudrais pourtant terminer sur une note positive. Pas obligé de connaître par cœur le Quatorzième quatuor de Beethoven pour avoir des « bons goûts » musicaux (ce terme est d’ailleurs un non-sens). Aujourd’hui plus que jamais nous avons la possibilité de vivre pleinement la musique, les musiques… Aimons les musiques vers lesquelles nos goûts nous portent, aussi diverses soient-elles, soyons ouverts, soyons critiques mais surtout, soyons INTRANSIGEANTS. Car si l’homme à toujours fait de l’art ; c’est aussi l’art qui a fait l’homme, alors NO PASARAN !

Publié dans Panthéon de Hugo

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